On oppose volontiers Max Weber à Karl Marx. Certes, le grand sociologue allemand était un libéral, hostile au communisme. Mais c’était aussi, nous rappelle Michael Löwy, textes à l’appui, un analyste très critique du capitalisme et de sa course effrénée au profit qui enferme l’humanité moderne dans un système implacable.
Relisant la célèbre étude sur les « affinités électives » entre l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Michael Löwy prolonge l’analyse. Il explore ainsi les « affinités négatives » entre l’éthique catholique et l’esprit du capitalisme et en retrouve la trace dans divers courants catholiques de gauche en Europe comme dans la théologie de la liberté en Amérique latine aujourd’hui. Il suit également les autres filiations anticapitalistes du sociologue de Heidelberg. D’une part celle du marxisme wébérien qui va de Georg Lukács à Maurice Merleau-Ponty, en passant par les premiers théoriciens de l’École de Francfort. D’autre part, celle d’un courant socialiste/romantique, essentiellement promu par des auteurs juifs allemands de la République de Weimar, tels Ernst Bloch ou Walter Benjamin.
Cette postérité, Michaël Löwy, qui est à la fois un wébérien érudit et un marxiste engagé, l’incarne à sa manière. Et il entend montrer combien le courant critique du marxisme wébérien reste d’actualité alors que la toute puissance des marchés emprisonne, plus que jamais, les peuples dans la cage d’acier du calcul égoïste.
Ce livre, paru chez Stock en 2013, reparaît enrichi de deux essais de Michael Löwy et Eleni Varikas, sur Max «Weber et l'anarchisme», et «Max Weber et l’anthropologie».
Michael Löwy (São Paulo, 1938), directeur de recherches émérite au CNRS, est l’auteur d’une œuvre riche et foisonnante depuis son premier essai sur La Pensée de Che Guevara (Maspero, 1970) jusqu’à ses travaux sur Weber, Kafka ou Benjamin, le judaïsme libertaire en Europe centrale ou la théologie de la libération en Amérique latine. Il a publié à L’éclat : Juifs hétérodoxes. Messianisme, romantisme, utopie (2010), Walter Benjamin. Avertissement d’incendie (2014, réédition L’éclat/poche, 2018) et Le sacré fictif (avec E. Dianteill) (2017), et La révolution est le frein d’urgence. Essai sur Walter Benjamin (2019)
Son livre « classique » Rédemption et utopie, paru en 1988 aux PUF, a été réédité aux Editions du Sandre en 2010.
