«L'Aristote de Jaeger » est quasiment une expression consacrée dans les études aristotéliciennes, tant son influence fut déterminante, et les discussions qu'il suscita furent vives et nombreuses. L' Aristote de Jaeger est au nombre de ces ouvrages indispensables, dont s'est dispensée pourtant l'édition française, obligeant de fait le lecteur francophone à se contenter de ses seuls commentaires. La thèse du livre est fondée sur une lecture «génétique» de l’œuvre du Stagirite, selon laquelle la philosophie aristotélicienne est constituée d'une série de doctrines développées au cours des différentes phases successives, et non d'un ensemble systématique. Cette lecture évolutionniste s'appuie sur une étude détaillée et comparée des différents traités, mais également des ouvrages de jeunesse. La thèse est bouleversante. Elle fut saluée, débattue, puis contestée. Mais le livre n'est pas la thèse. L’Aristote de Jaeger reste, aujourd'hui encore, un ouvrage d'une très grande richesse d'intuitions et d'informations, à partir d'une étude philologique précise des textes, qui nous montre un Aristote vivant, sujet à cette mélancolie de l'homme de génie qu’il a décrite lui-même. Il incite à une meilleure appréciation de l'homme et de son oeuvre. Il reste ce livre incontournable pour tous ceux qui veulent aborder l'œuvre du philosophe de Stagire.
Werner Jaeger est né en 1888. Après avoir enseigné à Bâle et Kiel, il succède à Willamowitz à l'Université de Berlin en 1921. Malgré le très grand prestige dont il jouit en Allemagne, il choisit de s'exiler au Etats-Unis dès 1936, pour s'installer d'abord à Chicago, puis à Harvard, où il dirige l'institut des Etudes classiques. Il meurt en 1961, laissant une oeuvre abondante. Son grand livre Paideia. La formation de l'homme grec a été partiellement traduit en français aux Editions Gallimard en 1964.
Alfred Korzybski Carlo Michelstaedter Jan Lukasiewicz