éditions de l'éclat, philosophie

YONA FRIEDMAN
UTOPIES RÉALISABLES


 

 

 LES UTOPIES SOCIALES

Une société est une utopie réalisée: c'est un projet d'organisation très complexe, accepté par un certain nombre d'individus qui, dans leur comportement quotidien, manifestent leur accord à ce projet verbalement non formulé.
   En effet, l'espèce humaine est la seule espèce animale (autant que nous le sachions) dont le comportement social n'est pas «naturel», mais «inventé», réglé par la spéculation intellectuelle. Et ceci à tous les niveaux de civilisation.
   L'invention «société» a un but utilitaire: faciliter la survie. Mais la survie de qui? de l'individu? de la collectivité?
   C'est une question qui reste ouverte.
   Personnellement, je pense à la primauté de l'individu. L'espèce n'est qu'une abstraction: elle n'a ni volonté, ni but, ni même un moyen de s'exprimer. Ce sont les individus qui veulent quelque chose, qui poursuivent un but et qui s'expriment. Ce n'est pas l'espèce qui a inventé l'individu, mais c'est l'individu qui a conçu l'abstraction «espèce».
   Un collectif «espèce» s'est réalisé à l'aide de la communication: les individus, inventeurs de l'abstraction, ont réussi, bien ou mal, à communiquer, les uns aux autres, l'abstraction inventée.

 

1. Les utopies sociales impliquent un langage

Quand nous avons parlé des utopies dans le chapitre précédent, nous avons parlé des utopies en général: sociales, technologiques, biologiques, etc. Mais, de la définition de l'utopie dont nous avons trouvé qu'elle reposait sur un mécontentement ressenti par une collectivité, puis sur un consentement à l'application d'une méthode destinée à faire disparaître ce mécontentement, et enfin sur l'importance des moyens mis en œuvre pour obtenir le consentement, il ressort que toute utopie est, au moins partiellement, sociale.
   Reconnaissant ce caractère essentiellement social, nous nous occuperons dans cet essai – surtout – des utopies sociales. Pour pouvoir les décrire autrement que sur le mode poétique, il nous faudra trouver un langage.
   Nous ne devons pas attendre de miracles de ce langage. Il ne s'agit pas de faire une description minutieuse des sociétés, mais au contraire de chercher un vocabulaire succinct, facile à retenir, et qui décrive la structure d'une société avec suffisamment de précision pour que n'importe qui puisse reconnaître cette structure, ou comparer les structures de différentes sociétés, sans que cette comparaison implique un jugement autre que personnel et libre. Ainsi, notre langage ne sera pas fondé sur une échelle de valeurs (qui est différente suivant chaque individu), mais représentera les éléments invariants de chaque structure. Il doit, en outre, permettre de reconnaître certaines qualités des organisations sociales qui pourraient sembler importantes pour la prévision de ce que nous pourrons attendre d'elles.

2. Représentation de la société par des graphes

Nous appelons société un ensemble d'individus assez particulier qui ne contient que des individus entre lesquels existe obligatoirement une relation quelconque. Un individu qui n'a aucune relation avec au moins un autre individu appartenant à cette société peut être considéré comme un homme hors de la société.
   Supposons maintenant que je veuille esquisser l'image d'une société. Je dessi nerai d'abord toutes les personnes qui lui appartiennent, puis je dessinerai les lignes reliant deux personnes entre lesquelles j'observerai une relation et ceci pour toutes les personnes appartenant à cette société. J'aurai alors représenté cette société par une figure et, dans cette figure, chaque individu sera relié par au moins une chaîne de lignes (relations passant par d'autres individus) à n'importe quel autre individu appartenant à cette société.

Si je remplace par des points les petits bonshommes de cette carte de la société, j'obtiendrai une figure composée de points et de lignes, dans laquelle un chemin au moins reliera n'importe quel couple de points arbitrairement choisis. Le mathématicien appelle cette figure un graphe connexe.

Bien entendu, ce graphe ne donne qu'une image extrêmement simplifiée de la société. Pour que cette image soit utilisable pour quiconque, nous devrons l'expliciter plus longuement.
   Dans ce but, je vais réexaminer le concept des relations, relations que j'ai représentées par des lignes, et je vais chercher à savoir avant tout qui dessinera cette image? Autrement dit, il me faut savoir qui est l'observateur de cette société.
   Remarquons tout de suite que différents observateurs verront différemment chaque société. Dans la plupart des cas, je ne trouverai pas facilement deux observateurs qui donneront la même importance à la même relation: donc l'importance de ces relations n'est pas observable sans erreur possible et nous ne chercherons pas à la considérer dans nos calculs.
   Par contre, l'existence pure et simple d'une relation directe entre deux individus appartenant à une société est observable. Ce qui veut dire que l'existence ou la non-existence d'une ligne dans le graphe représentant une société peut être consi dérée de la même manière par un très grand nombre d'observateurs. Nous nous contenterons donc de noter l'existence de ces relations.
   Une autre caractéristique de ces relations peut être également observable et notée: la direction d'une relation. Expliquons maintenant ce terme.
   Si nous observons deux personnes qui sont en communication (c'est-à-dire deux personnes entre lesquelles existe une relation), nous pouvons voir qu'une fois la communication terminée, l'un ou l'autre (ou les deux) individu changera son comportement préalable à la communication. Nous dirons, dans ce cas, que l'une de ces personnes (ou toutes les deux) a reçu une influence de l'autre.
   Cette influence a une direction, une flèche qui part de celui qui exerce l'influence vers celui qui la reçoit.
   Nous appellerons donc influence une relation entre deux individus quand cette relation a une direction (flèche) observable.

En conclusion, une société sera représentée par un graphe connexe orienté: c'est-à-dire par une figure composée de points et de lignes, dans laquelle il n'y a aucun point qui ne soit relié par au moins une ligne aux autres points et dans laquelle chaque ligne a une flèche qui représente la direction de la propagation de l'influence.

3. Les caractéristiques structurales des sociétés

Notre représentation d'une société nous permet de décrire, à l'aide de nos cartes de société, ses caractéristiques structurelles. Ces caractéristiques ne se référeront pas à des grandeurs mesurables car nous avons exclu plus haut et avant tout la possibilité d'observer les importances, les intensités, etc. des influences. Nous devrons donc nous contenter de certaines propriétés dites topologiques pour caractériser l'organisation d'une société. Ces propriétés topologiques indiqueront des caractéristiques découlant du mode de liaisons, de chemins et de circuits dans la carte d'une société, puisqu'elles correspondent au schéma de la propagation des influences dans un ensemble d'individus reliés entre eux.
   Pour arriver à la description d'une caractéristique aussi importante, nous ferons appel à une image: l'image de la situation d'un individu dans une société. Cette situation sociale sera définie par les influences que cet individu recevra des autres et exercera sur eux. Par exemple, s'il exerce une influence sur quatre de ses voisins et s'il ne reçoit aucune influence des autres, il sera considéré comme plus puissant qu'un autre individu qui, lui aussi, exercera quatre influences mais recevra deux influences venant des autres.
   Ainsi, la situation sociale d'un individu sera exprimée par la différence entre la somme des flèches (influences) qui partent de lui et la somme des flèches qui arrivent jusqu'à lui. Pratiquement, la situation sociale correspondra à un bilan d'influences de chaque individu. Mais – et c'est très important – dans ce bilan, nous sommes obligés de ne pas associer une grandeur différente à des flèches différentes car nous sommes convenus que la grandeur d'une influence n'est pas observable.

Nous considérons donc, par une simplification inévitable, chaque influence directe (donc transmise directement d'un individu à autre) comme ayant la même importance aux yeux d'un observateur qui n'est pas relié à l'un de ces deux individus (c'est-à-dire à un observateur qui n'appartient pas à la même société).
   Notons au passage que cette convention ne veut pas dire, bien entendu, que les deux individus reliés par cette influence n'associent pas une valeur, une importance quelconque à cette influence. Nous pouvons être sûrs qu'ils en associent une; il est même probable que cette importance est très différente pour l'un et pour l'autre: celui qui exerce l'influence pourra l'estimer très importante et celui qui la reçoit pourra aller jusqu'à l'ignorer; ou bien, inversement, quelqu'un peut ignorer l'influence qu'il exerce et celui qui la reçoit peut l'apprécier hautement.
   Pour éviter toute équivoque, nous avons donc considéré comme étalon l'observation d'un observateur extérieur à la société observée. Ajoutons encore une précision supplémentaire: si cet observateur considère toutes les influences directes comme égales entre elles, il pourra observer aussi qu'une influence indirecte (donc transmise par plusieurs personnes) s'affaiblit au cours des transmissions consécutives par suite du phénomène que la théorie d'information appelle le bruit: erreurs, mésinterprétations, omissions.
   Imaginons, par exemple, qu'une influence, partant d'un individu, est transmise par un intermédiaire à un autre individu. La moindre erreur, commise par cet intermédiaire quant au contenu de cette influence, fera que le destinataire ne recevra qu'une partie de l'influence qui lui a été originellement envoyée; évidemment, cette partie arrivée à destination sera d'autant plus amoindrie qu'il y aura plus d'intermédiaires participant à son acheminement.

 

Nous utiliserons, pour décrire cette dégradation de l'influence au cours des transmissions, une règle simple: nous supposerons que l'intensité d'une influence se dégrade en proportion inverse du nombre des transmissions intermédiaires nécessaires à son acheminement.

Nous sommes maintenant préparés à définir la situation sociale de chaque personne dans une société, situation vue par un observateur extérieur. Elle sera représentée par la différence entre la somme de toutes les influences (directes ou indirectes) exercées par un individu déterminé sur tous les autres individus de cette société et la somme de toutes les influences exercées sur lui par les autres.

Cette formule qui peut, à première vue, sembler rébarbative, est en fait si simple qu'un enfant de douze ans, élève de cinquième, n'aurait pas besoin de plus d'une heure de cours pour la comprendre, y compris les deux matrices qui vont suivre.
Pour faire le calcul très simple qui découle de notre formule, il nous suffit de dresser ce qu'on appelle la matrice des chemins du graphe qui représente la carte d'une société donnée. À partir de ce graphe (ou matrice), nous pouvons obtenir les deux sommes nécessaires pour avoir le paramètre de la situation sociale.
   À l'aide de ce calcul, ce n'est pas uniquement la situation sociale de chaque membre de la société de notre exemple (ici elle contient 7 personnes) que nous avons obtenue, mais également la hiérarchie réelle qui est établie (souvent tacitement) dans cette société.
   Nous appellerons structure mathématique d'une société sa description soit par un graphe (carte de la propagation des influences), soit par la matrice des chemins (tableau de la dégradation des influences).
   La structure sociale de cette même société, c'est la hiérarchie réelle des situations sociales dans la société.
   Il est évident que la structure sociale d'une société est une sorte de fonction de la structure mathématique de cette même société. Ainsi, certaines propriétés (topologiques) de la structure mathématique influencent la structure sociale. Par exemple, un arbre comme celui de la figure suivante

correspondra toujours à un certain type de société (que nous appellerons hiérarchique, et un graphe du type de celui-ci

correspondra toujours à un autre type de société que nous appellerons hiérarchique, et égalitaire.

Bien entendu, la hiérarchie que nous voyons dans la figure ci-dessus nous servant d'exemple, n'est que la hiérarchie observable par l'observateur extérieur à cette société. On peut très bien imaginer que la hiérarchie observée par Monsieur A ou par Monsieur B diffère sensiblement de cette hiérarchie objective.
   Dans notre carte de la hiérarchie réelle, établie par un observateur extérieur, c'est Monsieur F qui est le membre le plus influent de cette société; mais Monsieur B, par exemple, peut très bien imaginer que c'est lui-même le membre le plus influent du groupe. En effet (et nous le verrons dans un autre chapitre), la fidélité de la carte (graphe), quant à la description fiable de la structure d'une société, dépend de l'attention (souvent dirigée arbitrairement) de l'observateur. C'est pourquoi Monsieur B peut tracer une carte de la hiérarchie très différente de la nôtre, si, pour des raisons qui ne regardent que lui (aveuglement, vanité, optimisme), il considère comme négligeables les influences qu'il reçoit de Messieurs A et F.
   Supposons maintenant qu'un des membres de cette société la quitte, pour une raison personnelle quelconque. Immédiatement, la hiérarchie se transformera par suite de cette défection. Certains membres de la société en bénéficieront (leur situation sociale s'améliorera à leurs yeux); à d'autres, par contre, cette défection portera préjudice. Ainsi, si nous supposons – pour la simplicité de l'exemple – que tous les membres de cette société sont intéressés à obtenir une place plus élevée dans la hiérarchie, ceux qui bénéficieraient de la défection de Monsieur X seront ses adversaires et ils essayeront de le chasser de la société; ceux qui, par contre, en seraient victimes, essayeront de retenir Monsieur X et d'empêcher son départ: ils seront ses «alliés».
   Par une simple fonction, que j'appelle la dépendance d'un membre de la société au départ de Monsieur X, nous pouvons dresser un tableau d'alliances propre à cette société.

 

Mais expliquons d'abord ce qu'est la dépendance. Imaginons que Monsieur X fasse la grève (il est malade, il boude, il est furieux, etc.), en un mot qu'il devienne sourd et aveugle aux influences qu'il reçoit d'ordinaire et à celles qu'il exerce sur les autres. Ce nouveau comportement aura un effet sur les autres membres de la société et la dépendance l'indique. Par exemple, en regardant notre tableau, nous voyons que Monsieur C, dont la situation sociale était jusqu'alors la plus basse, perturberait gravement les autres par sa défection (les autres sont donc dépendants de lui); Messieurs F et G, par contre, hautement situés dans leur société, ne manqueraient guère au bon fonctionnement de la société, s'ils la quittaient. Monsieur B représente un cas très intéressant: bien que mal situé dans l'échelle sociale, sa défection aurait pour effet de débloquer, pour ainsi dire, la situation sociale de beaucoup d'autres.
   La dépendance se calcule donc simplement en obtenant la différence entre la situation sociale d'une personne appartenant à une société et la situation sociale de la même personne après le départ de Monsieur X. La première situation sociale se calcule donc sur le graphe qui représente la société dans sa totalité; la deuxième, par contre, doit être obtenue du sous-graphe de cette même société après le départ de Monsieur X (sous-graphe ne contenant pas X).

Nous avons obtenu ainsi, à l'aide d'une méthode tellement simple que n'importe quel enfant de douze ans peut l'utiliser, une description de la structure réelle de toute société imaginable.
   N.B. — En effet, la simplicité de la notation à l'aide de graphes, et la simplicité des opérations (qui restent très simples malgré l'écriture mathématique rébarbative), est voulue. Je crois qu'une étude sur la société n'est utile que si elle présente une méthode utilisable et applicable par le non-expert, c'est-à-dire par un individu quel qu'il soit. (C'est la raison pour laquelle la plus grande partie de ce livre a été traduite en un langage simple, celui des images, traduction qui a paru en 1974 sous le titre: Comment vivre entre les autres sans être chef et sans être esclave? aux éditions Jean-Jacques Pauvert, à Paris.)

 

4. La société «égalitaire» et la société «hiérarchique»

J'essaierai de définir, après ces explications préliminaires, deux concepts de la société que je trouve assez importants: la société égalitaire et la société hiérarchique.
   
Je peux considérer une société comme égalitaire si tous ses membres ont la même situation sociale. Autrement dit, dans une société égalitaire, la différence entre la totalité des influences exercées et la totalité des influences reçues sera la même pour tous. Cette société ne contient donc pas de notables ayant de l'influence.

Figure 17

 

Une société égalitaire est donc possible. Un grand nombre de graphes* peuvent satisfaire à la condition que nous venons d'énoncer (d'autres contraintes se manifesteront néanmoins, contraintes que nous allons examiner bientôt). Une société égalitaire sera considérée comme stable si la dépendance de chaque membre de cette société au départ de n'importe quel autre membre est la même.
   L'autre type de société, qui est important car il en existe en très grand nombre, c'est la société hiérarchique: cette société est représentée par un arbre. Elle est caractérisée par une hiérarchie dégressive des situations sociales, qui part de la racine de cet arbre (la personne représentée par la racine est donc la plus puissante) et par une hiérarchie progressive des alliances, progression qui part de la même racine (la dépendance au départ d'un autre sera donc souvent moindre pour les individus situés en bas de la hiérarchie).

Figure 18

Nous avons déjà vu ailleurs que notre système de représentation des sociétés repose sur la propagation de l'influence dans un ensemble d'individus. Les deux sociétés que nous avons esquissées ici sont pratiquement deux schémas de propagation diamétralement opposés: dans la société égalitaire, cette propagation pouvant partir de n'importe quel membre de la société, arrivera à tous les autres, relativement lentement, mais avec une très grande certitude. Par contre, dans la société hiérarchique, il n'y a qu'un seul membre qui puisse assurer qu'une influence arrive à tous les autres, et cela avec une vitesse très grande, mais la certitude que l'influence arrive réellement est extrêmement réduite (car la défection d'un seul membre de cette société produit déjà un barrage, infranchissable à un certain nombre d'acheminements).
   Bien entendu, ces deux types de société ne sont pas les seuls possibles; nous en trouverons d'autres plus tard; je les mentionne ici à cause de leur importance particulière. En effet, toutes nos utopies actuelles ont pour but la société égalitaire et toutes nos organisations techniques sont fondées sur la société hiérarchique. Évidemment, ces deux types de société n'existent pas à l'état pur, mais il ne manque pas d'organisations qui se rapprochent de l'un ou de l'autre de ces modèles.

 

5. La société contient des hommes et des objets

Je voudrais corriger une simplification que j'ai commise (entre autres) au commencement de ce chapitre. J'ai défini la société comme un ensemble de personnes humaines qui sont reliées entre elles par un système d'influences. En réalité, ce n'est pas aux hommes seuls à qui chacun de nous est relié par un système d'influences, mais aussi à des objets.
   Je serai donc obligé d'utiliser une nouvelle définition suivant laquelle une société est un ensemble de personnes humaines et d'objets, reliés par un système d'influences. Ainsi donc la société peut être considérée comme ayant un mécanisme mixte réunissant personnes et objets.
   Pour plus de précision, je dois souligner la différence entre personnes humaines et objets, du point de vue de cette étude. Cette différence tient au fait qu'un homme se préoccupe de sa situation dans une société alors qu'un objet, par contre, n'en est pas conscient.
   Cette définition nous permettra d'imaginer d'autres alternatives sociales, plus facilement réalisables que les utopies sociales actuelles (même si ces alternatives, elles aussi, sont soumises aux contraintes que nous traiterons plus tard). Une telle alternative pourrait être, entre autres, une société égalitaire par rapport aux hommes qui en font partie, et hiérarchique par rapport aux objets qui lui appartiennent. Nous allons d'ailleurs revoir tout cela, plus en détail, un peu plus loin.

 

6. «Société» et «environnement» sont des synonymes

Le premier résultat important que nous allons obtenir dans l'application de notre nouveau langage (celui de la définition de la société et de sa représentation par des graphes) sera l'équivalence des termes société et environnement.
   
Cette équivalence est pratiquement comprise dans la définition: ensemble contenant des personnes humaines et des objets. En fait, la définition généralement utilisée pour l'environnement qui est la suivante: ensemble des objets influencés et influençant les hommes, est insuffisante. En effet, pourquoi pas objets et hommes? Quant à la définition de la société, nous avons déjà fait la remarque correspondante précédemment.
   Société et environnement signifient donc la même chose. C'est cette même chose que je préfère appeler les autres. Je n'ai pas trouvé, de terme plus exact pour indiquer à quel point l'environnement dépend de «celui» qui en parle. En effet, si Monsieur X parle de la société ou de son environnement et qu'il dit «les autres», il y comprendra Monsieur Y et sa maison, etc. mais il s'en exclura lui-même. Par contre, Monsieur Y y inclura Monsieur X, un arbre, etc., et tout le système auquel il est relié, à l'exception de lui-même.
   Les autres sont différents pour chacun de nous.

* Ce sont les graphes complètement orientables, dans lesquels toutes les faces sont circonscrites par un chemin quelconque qu'on peut parcourir sans rencontrer une flèche contraire à la direction des autres flèches.
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