éditions de l'éclat, philosophie

JEAN-PIERRE COMETTI
LE PHILOSOPHE ET LA POULE DE KIRCHER


Introduction

 

 

 

Le manque d'imagination n'est pas tant une incapacité à dire ou à penser du nouveau qu'une indifférence à l'égard de ce qui présente par rapport à tout passé philosophique des signes d'altérité radicale

Roger Crémant,

Les matinées structuralistes

 





Dans l'introduction de sa «Scène en un acte» : Les matinées structuralistes, à une époque que d'aucuns jugeront peut-être lointaine, Clément Rosset, alias Roger Crémant, évoquait l'unité de ton qui caractérisait alors la littérature critique et philosophique1. Depuis, les choses ont changé à la surface sans évoluer en profondeur; une certaine similarité de ton s'est maintenue en se mariant à des timbres plus contrastés, remontant d'un fonds que l'on croyait tari. Le «pétillement» et le «relâchement» ont survécu aux feux du structuralisme; ils subissent désormais le contrecoup d'une gravité que la philosophie morale ou l'«éthique», pour utiliser un mot désormais recommandé, s'est appropriée en bénéficiant de la faveur du public et de diverses circonstances que les belles années du structuralisme ne permettaient pas d'imaginer. On fabrique aujourd'hui des «Dictionnaires de philosophie morale» pour se munir d'improbables instruments, et rien n'étant décidément simple, on se tourne en même temps vers des intérêts ou des goûts qui assureraient à Alain, s'il était encore de ce monde, un succès très supérieur à celui qu'il a connu de son vivant. De leur ancienne complicité avec le structuralisme, la déconstruction et les pensées qui flirtent avec elle ont gardé le «pétillement», tandis que le postmodernisme, qui en est la version désenchantée, en a hérité une nouvelle forme de «relâchement». Avec le recul que nous ont donné les années «post» (celles des déconvenues et des apparentes conversions en tous genres), et la découverte tardive que c'est «toujours la même histoire», on pourrait certes avoir le sentiment que les turbulences de cette période n'ont pas été inutiles. Si les auteurs qui s'y sont illustrés n'ont pas rompu avec les plus solides habitudes des philosophes professionnels2, du moins leurs convictions et leur souci de radicalité les ont-ils tenus éloignés du retour en force que Ryle entrevoyait en écrivant: «Mon opinion personnelle est que la phénoménologie qui se veut philosophie première est à présent en train de mener à la banqueroute et au désastre et finira ou dans un subjectivisme suicidaire ou dans un mysticisme creux3. »

Le pétillement et le relâchement n'en ont pas eu raison. La piété leur a offert un remède à leurs excès ou, comme on le dit d'un vin, à leur manque de corps. L'alliance de la théologie et de la philosophie a beau ressembler à ce que Heidegger appelait légitimement un «cercle carré», une partie de la philosophie française a néanmoins cru trouver dans la phénoménologie une percée vers l'absolu et la possibilité d'un langage qui en appelle autant au mystère qu'à la grâce4. Cette apparente «embardée» n'est pourtant pas surprenante. La coexistence typique de deux traditions respectivement constituées par le positivisme et le spiritualisme s'est toujours traduite par des oscillations donnant alternativement l'avantage à l'une ou à l'autre. Les accents néodionysiens qui se sont mariés à la bouffée structuraliste, en offrant à celle-ci l'illusoire éclat d'une libération, étaient trop étroitement liés à des sources hexagonales pour constituer une authentique alternative. Un indice des limites auxquelles ils étaient destinées à se heurter – et du peu de chances qu'ils offraient de couper la voie à la théologie ou au néokantisme qui déferlent aujourd'hui – réside dans l'indifférence que la plupart des philosophes français affichent à l'égard de ce qui se fait ailleurs, à la notable exception de l'Allemagne5. Comment, dès lors, ne pas avoir le sentiment de tourner en rond et ne pas penser qu'il n'y a plus grand chose à faire, en philosophie, sinon à épouser telle ou telle catégorie de sciences – les sciences cognitives, par exemple – ou à s'épuiser dans la routine d'une déconstruction sans fin?

Cette situation trouve une plaisante illustration dans l'image qu'emploie le Général Stumm von Bordwehr, afin de décrire l'«esprit civil», dans L'homme sans qualités.

L'Esprit civil, déclare-t-il à Ulrich, me paraît être ce que l'on nomme chez les chevaux un mauvais mangeur [...] Tu as beau donner à cette bête-là double ration, elle n'en devient pas plus grosse! Ou disons plutôt, reprit-il pour tenir compte d'une brève objection du maître de maison, qu'elle devient un peu plus grosse chaque jour, mais que ses os ne se développent pas et que le pelage reste terne; elle n'y gagne qu'une panse gonflée d'herbe.

Tels sont nos poisons. Cette description convient assez à la philosophie, ainsi qu'à l'esprit ou aux convictions qui servent de fond à la conversation contemporaine; ce ne sont pas les campagnes orchestrées par les «médias» qui y changent quoi que ce soit6. Sauf à céder aux mirages de l'absolu, de l'inapparent ou aux attraits de l'Autre, le philosophe se trouve dans une situation qui le place, à plus d'un égard, dans la position de la célèbre poule de Kircher, laquelle restait hypnotisée par le cercle de craie tracé autour d'elle. La paralysie de la poule est mystérieuse. La nôtre l'est moins; elle tient en partie aux bizarreries de notre rapport à l'histoire et à la façon dont nous concevons le passé et l'avenir. Comme le suggérait récemment un ministre, pourtant bien informé, «on a suffisamment de mal, aujourd'hui, à prévoir le passé; comment voulez-vous que nous puissions prévoir l'avenir?» Il ne croyait pas si bien dire. A force d'attribuer à ce qui se produit aujourd'hui une signification «historique», on parvient de moins en moins à savoir ce qu'il en restera demain. Notre vision du temps n'en est pas seulement obscurcie; elle nous dispense de croire à ce que nous faisons réellement, et de donner au présent une signification qui soit liée à d'authentiques choix. De là à penser l'histoire sous la marque d'un sens mystérieusement épuisé, il n'y a qu'un pas, que plusieurs ont franchi depuis longtemps, non sans en avoir d'abord célébré les lendemains. Singulièrement, cette impuissance caractéristique s'exprime aussi dans une catégorie particulière d'attente marquée par le retour : retour de la croissance, du sens, de la morale, du religieux, de la «confiance», etc.

A vrai dire, les incomparables prestiges dont jouit le «futur antérieur» ne datent pas d'aujourd'hui; l'importance qu'on leur attribue se mêle à un type d'attitude et d'incapacité que nos comportements illustrent de mille manières, à peu près dans tous les domaines et en toute circonstance. On en trouve une illustration dans les diagnostics critiques, sceptiques ou désabusés qui ont succédé, depuis près de trente ans, à la théorie, au sens où Althusser en parlait, à la nécessité d'une juste appréciation des conditions historiques ou encore à la hauteur avec laquelle des penseurs comme Heidegger pouvaient associer notre histoire et l'histoire de la métaphysique.

Sans que l'on s'en rende toujours très précisément compte, les thèmes de la déconstruction ont significativement marqué les esprits, non sans raisons certes, mais à tel point qu'un soupçon frappe en permanence les tentatives que les constats d'impossibilité, dont le «postisme» est la source, ne parviennent pas à arrêter. Entre la monotonie d'une déconstruction sans bornes et l'attitude pieuse dans laquelle une partie de la philosophie s'est réfugiée, aucun autre choix ne semble autorisé. Il est même étrange de constater que ces deux attitudes, quoique rivales, parviennent aisément à coexister, pour ne pas dire à cohabiter, comme leur position institutionnelle permet aisément de s'en convaincre. Le «tournant théologique» n'a rencontré que peu de résistance auprès de ceux que leur passé militant, leur amour de la science ou leurs penchants positivistes auraient dû dresser contre lui. Il se peut que les corporatismes, voire un vague sentiment de solidarité nationale, aient joué un rôle de frein. L'indifférence, teintée d'hostilité, qui se manifeste la plupart du temps à l'égard des auteurs ou des courants qui n'ont pas eu le bonheur de parler, du seul fait de leur naissance, une «langue philosophique», le français ou l'allemand, de préférence, l'a emporté sur la méfiance qu'auraient dû éveiller, en toute logique, les dérives spiritualistes et mystiques qui se sont emparées de la phénoménologie à la française. Une autre source d'étonnement et de paradoxe se manifeste également dans la façon dont sont généralement accueillies les philosophies qui, comme le pragmatisme, se sont écartées de la tradition analytique sans se convertir pour autant aux tendances «continentales». Le peu de considération qui les entoure l'emporte de beaucoup sur les réticences qu'inspirent les orientations théologiques qui dominent, par exemple, une partie des études cartésiennes ou husserliennes. La réputation de professionnalisme et de sérieux dont bénéficie un courant ou un auteur peut parfois faire oublier, auprès des professionnels, la nature philosophiquement discutable ou fort peu philosophique des convictions qu'il représente. On n'en comprend que mieux la marginalité à laquelle s'exposent en permanence les choix qui n'ont pas l'heur de répondre aux présupposés ou aux habitudes dans lesquelles nous nous sommes installés.

Les philosophes dont il sera question ici occupent une position «à part»; leur œuvre n'en éclaire que mieux les malaises et la relative paralysie qui affecte une partie de la philosophie contemporaine. Je ne me proposerai pas de dire jusqu'à quel point ils répondent à ce que Jacques Bouveresse appelle, dans son dernier livre, la «demande philosophique»7. Il me semble que cette demande, celle qui s'adresse à la philosophie, n'a pas forcément la nature qu'on lui prête, surtout en ce moment, ou qu'on lui attribue volontiers lorsqu'on se fait une idée à la fois définitive et exclusive de ce qu'elle est ou de ce qu'elle doit être. La philosophie, après tout, y compris la meilleure, ne se rencontre pas forcément là où on la situe d'ordinaire, dans les systèmes, les prouesses techniques, les visions du monde ou, désormais, les «cafés». C'est ce que je crois avoir compris, pour ma part, auprès de Musil, de Wittgenstein et des pragmatistes. Au reste, contrairement à ce que suggérait Musil lui-même, et à ce que semble penser Bouveresse, je ne suis même pas sûr que notre époque soit avide, comme d'autres avant elle, de «visions du monde». A ce type de besoin, nous avons plutôt substitué ce que je serais tenté d'appeler un goût pour les versions du monde. Non pas que le relativisme goodmanien ait aujourd'hui la faveur d'un grand nombre d'esprits, y compris de ceux qui l'ignorent. La réalité est à la fois plus simple et plus complexe. Nos lunettes sont des loupes; nous comblons comme nous pouvons le déficit de réalité dont nous nous sentons accablés. En même temps, nous nous sommes accoutumés à l'idée que la seule chose importante n'est pas l'existence d'une vision du monde, ou de telle ou telle vision, mais la valeur inappréciable que nous attribuons à la nôtre. L'ethnocentrisme est une chose; on peut même, à ce sujet, faire de nécessité vertu. Quel nom faut-il toutefois donner à la prolifération des mondes ou des langages privés sur laquelle semble avoir débouché le souci moderne de soi? La «politique de l'universel», comme dit Charles Taylor, doit désormais faire face à un type de certitude qui entame dangereusement les chances d'équilibre que Hegel croyait percevoir entre la sphère de l'Etat et celle de la Société civile. Proust lui-même, dans Le temps retrouvé, laissait entrevoir un temps où les privilèges qu'il attribuait aux artistes pourraient être revendiqués par chacun: «Autant qu'il y a d'artistes originaux, autant nous avons de mondes à notre disposition, plus différents les uns des autres que ceux qui roulent dans l'infini.»

Les derniers chapitres de ce livre sont plus particulièrement orientés vers des questions qui, directement ou indirectement, ont leur source dans cette situation. Le problème qui les sous-tend est celui de la «Poule de Kircher», c'est-à-dire de ce qui est arrivé à la philosophie et des chances qu'elle a d'échapper au sort du malheureux volatile. A l'exception de deux d'entre eux, une première version en a été publiée dans diverses revues au cours des quatre dernières années8. Deux fils les parcourent. Tout d'abord, les philosophes que j'ai sollicités me semblent avoir opportunément ranimé la discussion philosophique en s'efforçant de la détourner de ses vains rituels. Leur lecture a nourri chez moi, avec les années, quelques convictions simples, en commençant par l'idée que la philosophie, pas plus que n'importe quelle autre discipline intellectuelle, ne peut se prévaloir d'un point de vue privilégié sur l'histoire, la culture ou ce que l'on voudra. Sur ce point, je partage entièrement les convictions de Richard Rorty ou celles qu'exprime Jacques Bouveresse lorsqu'il écrit : «Notre estimation de l'importance de la philosophie et des grands philosophes est, de façon générale, beaucoup moins rationnelle qu'on ne pourrait l'espérer et je ne trouve pas scandaleux de suggérer à la philosophie, qui se plaint habituellement plutôt d'être ignorée et méprisée, de se demander également de temps à autre ce qu'elle fait réellement pour justifier la considération très réelle et parfois excessive dont elle bénéficie9.» Mon sentiment me porte toutefois à penser que les philosophes, à ce sujet, obéissent beaucoup plus qu'on ne croit à une compulsion dont on ne voit nulle part qu'elle ait jamais été réellement éradiquée. En tout cas, je ne parviens pas à comprendre quel sens cela pourrait avoir – contrairement à ce que pourrait suggérer la lecture de Apel ou de Habermas – de rechercher un point de vue extérieur à nos jeux de langage ou à nos formes de vie, à moins de s'en remettre, comme cela est la plupart du temps le cas, à une pétition de principe. Comme j'ai essayé de m'en expliquer ailleurs, mon sentiment est celui de deux impasses également obscures et inutiles, respectivement représentées, en tout premier lieu, par les mythologies linguistiques qui, d'une manière ou d'une autre, privent le langage de toute relation d'extériorité, et, en second lieu, par celles qui s'efforcent de le relier verticalement au «monde» en attribuant ainsi, dans les deux cas, à un certain type d'usage ou de pratique un statut exclusif ou privilégié10.

Sur ces différents points, l'attitude la plus recommandée me paraît être celle que la tradition pragmatiste a illustrée en s'attachant à prendre clairement la mesure de ce que nos pratiques comportent d'arbitraire, de contingent et d'irréductiblement ouvert, et en s'efforçant d'en tirer les conséquences sur un plan éthique, social aussi bien que politique11. Les options du pragmatisme, telles qu'elles s'expriment aujourd'hui dans l'œuvre de Richard Rorty ou dans le débat qui oppose celui-ci à Hilary Putnam, sont évoquées en plusieurs endroits de ce livre, et elles sont plus précisément discutées dans les quatre derniers. Il serait parfaitement inutile d'anticiper sur les réflexions qui y sont développées. On y reconnaîtra toutefois un autre fil de l'ouvrage; elles ont en effet accompagné, dans une large mesure, l'entreprise éditoriale qui a donné naissance à la collection «Tiré à part» et elles en constituent, pour ainsi dire, le contrepoint philosophique. Au demeurant, il ne me semble pas que la réflexion philosophique, voire la réflexion tout court, si l'on doit en attendre la seule chose qu'il soit permis d'en espérer, non pas une connaissance ni une édification, mais une simple clarification de nos habitudes et de nos difficultés mentales, puisse bénéficier du genre de «conversation» qui tend à se répandre dans les cafés ou dans les médias; et je ne crois pas non plus qu'une étude, certes toujours respectable, de l'histoire de la philosophie, quelle qu'en soit la forme, puisse entièrement répondre à cette demande-là. Les livres, que menace l'indifférence dans laquelle semblent paradoxalement les tenir certains «philosophes», une partie du public, voire certains éditeurs, sont plus que jamais utiles, au même titre que la méfiance que devraient inspirer les consensus intellectuels, en particulier ceux qui restreignent dangereusement le champ de nos intérêts ou de notre curiosité.

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A une exception près, celle de Jacques Bouveresse, les «contemporains» qui ont nourri les réflexions dont ce livre est issu appartiennent à un horizon géographique et intellectuel différent du nôtre12. Leur intérêt – celui que nous avons eu à les fréquenter, à les traduire et à les publier – tient, entre autres mérites, à leur «regard lointain». Il se peut que notre prédilection pour une histoire héroïque des idées, sans compter les incontestables défauts des présentes études, masque la portée des questions qu'ils nous aident à poser. Si tel devait être le cas, la responsabilité en incomberait moins à l'absence de profondeur qui leur est parfois reprochée qu'à notre habitude d'évaluer l'originalité ou l'intelligence à partir des seuls vertiges qu'elles suscitent en nous.

1. Roger Crémant, Les matinées structuralistes, Robert Laffont, «Libertés», 1969, p. 9.

2. Cf. ce que suggérait Jean-François Revel dans son livre Pourquoi des philosophes (Robert Laffont, «Libertés», 1957, p. 25): «Dans notre tradition philosophique, telle que l'imposent les quelques milliers d'ouvrages qui la contiennent matériellement, une inversion de sens a donc fait que les philosophes ne nous invitent plus à comprendre que leur propre système. Or, un système philosophique n'est pas fait pour être compris: il est fait pour faire comprendre.»

3. Cité par Dominique Janicaud dans Le tournant théologique de la phénoménologie française, «Tiré à part», L'Eclat, Combas, 1991.

4. Ibid.

5. Les penseurs allemands bénéficient depuis longtemps, en France, d'une reconnaissance privilégiée, généralement tenue pour naturelle, comme le montrent les célébrations quasi rituelles des vertus philosophiques de la langue allemande. Bien entendu, cette reconnaissance concerne en priorité les penseurs qui y puisent une «profondeur» que le français n'autoriserait pas, à moins de le soumettre au genre de torsions et de contorsions dont certains traducteurs français de Heidegger sont devenus experts. Nos goûts, à ce sujet, peuvent expliquer pourquoi les philosophes allemands contemporains éveillent ordinairement un intérêt bien moindre que leurs aînés.

6. L'image qui s'est récemment imposée dans les médias tend à accréditer l'idée d'un intérêt aussi soudain que généralisé pour la philosophie et les philosophes. La preuve en serait donnée par les tirages dont bénéficient certains livres, la fréquentation des «cafés philosophiques», bref l'existence d'une «demande» que certains n'hésitent même pas à comparer à ce qui s'est passé à Athènes à l'époque de Socrate. Cette pseudo-découverte recouvre en fait un double mensonge en laissant croire : 1) que la demande du public vise une chose que la philosophie est à même de donner, comme si cette demande était «philosophique» et comme si ce que la philosophie peut offrir était en soi parfaitement clair; 2) que la situation de la philosophie, toutes tendances ou toutes écoles confondues est florissante, alors qu'un très grand nombre de livres publiés ne pourraient l'être s'ils ne bénéficiaient d'aides et de subventions diverses, ou si certains auteurs et éditeurs n'y consacraient leur temps sans en attendre aucun bénéfice. Ce n'est évidemment pas le cas de la philosophie qui se pratique dans les cafés, les cabinets, etc. Mais il est vrai que celle-ci «fait du bien», comme le suggérait récemment, dans une émission de télévision, un «cafetier» aux accents gascons. Je préfère ne rien dire des déclarations qui laissent entendre que, d'un bout à l'autre de la chaîne, si je puis dire, il s'agit bien de «la même chose».

7. J. Bouveresse, La demande philosophique, L'Eclat, «Tiré à part», Paris, 1996.

8. Les chap. VI et VII. Les autres chapitres (I à V, VIII et IX) ont été primitivement publiés, dans une version différente, dans Critique (chap. I), la Revue Internationale de philosophie (chap. II), Etudes (chap. III et V), Philosophiques (chap. IV), Le Banquet (chap. VIII), Philosophie politique (chap. IX).

9. La demande philosophique, op. cit., pp. 10-11. La proximité de Bouveresse et de Rorty sur ce point n'entame en rien le désaccord qui existe entre eux, comme le montre ce livre sur de nombreux autres points. Il ne peut être question ici d'en donner une idée plus précise, ni de dire pourquoi je m'écarterais, chemin faisant, de certaines convictions défendues par Bouveresse, au demeurant plus proche de Putnam que de Rorty.

10. J.-P. Cometti, Philosopher avec Wittgenstein, «L'interrogation philosophique», PUF, Paris, 1996.

11. J'ai tenté d'en donner un aperçu dans «Le pragmatisme, de Peirce à Rorty», in M. Meyer (éd), La philosophie anglo-saxonne, PUF, Paris, 1995.

12. On me permettra d'ajouter que cette exception n'est pas un hasard, comme le suggère le texte que Bouveresse écrivit il y a plusieurs années pour un volume publié en Angleterre, sous le titre: «Why I am so very unfrench» [WSU], in Philosophy in France Today, éd. par A. Montefiore, Cambridge University Press, 1983.

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