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Les Cahiers du judaïsme |
TELECHARGER LE BULLETIN D'ABONNEMENT | Les Cahiers du judaïsme, héritiers depuis 1998 des Nouveaux Cahiers créés en 1965 sous les auspices de l’Alliance israélite universelle, se veulent un lieu de réflexions et de débats autour de la pensée juive, appréhendée dans toutes ses dimensions et ancrée dans une société ouverte où s'expriment des cultures multiples.
La revue s'inscrit dans le renouveau des études juives qui se manifeste depuis plusieurs années tant en France qu'à l'étranger. Son ambition est d'accueillir les formes de créativité les plus diverses, d'attirer vers elle des historiens, anthropologues, sociologues, écrivains, peintres, poètes et musiciens, afin de constituer un lieu d'échanges, de rencontres et de discussions plurielles autour du judaïsme passé et présent. À compter de ce numéro 25, Les Cahiers du judaïsme sont édités par les Éditions de l’éclat. |
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Revue publiée par l’Alliance israélite universelle et diffusée par les éditions de l'éclat Directeur: Pierre Birnbaum Responsable éditoriale: Comité de rédaction |
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N° 25: La Rue juive
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Prix de l’abonnement 2009
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Sommaire |
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Editorial |
Les traces des Juifs s’inscrivent surtout, aussi bien en Diaspora qu’en Israël, dans des territoires urbains dont la pérennité se trouve fréquemment remise en question par des expulsions soudaines, des pogromes, des guerres ou encore des changements de statut politique. Ces traces dessinent une géographie fluctuante qui révèle à chaque fois une présence, une ‘rue juive’ dont la forme change selon les époques et les lieux. Ici, comme en Alsace, entre Strasbourg et Sélestat, quelques ‘cours des Juifs’ organisées autour de la synagogue; là, en Avignon, une ‘carrière’, ou encore, à Francfort, un quartier entier, une Judenstadt; à Vienne, un lieu symbolique, Leopoldstadt; à Czernowitz, une stadt qui conserve toute entière les accents du shtetl; et ailleurs, comme à Alger, un foisonnement urbain si dense qu’il constitue le territoire en un véritable kahal; ailleurs encore, en Espagne ou en Italie, tant de Juderia ou encore de Ghetto, traces incontestables de la présence juive urbaine à travers les siècles. C’est la seule modernité et non l’histoire tragique récente qui altère cette Rue des Juifs et pousse au transfert vers d’autres quartiers, tel Rehavia, nombre de ses institutions juives les plus symboliques. De même, à Tel-Aviv, la modernité frappe aussi la ville, le Dizengoff Center fait figure de lieu anonyme, une «espèce d’emprisonnement volontaire» qui ne véhicule en rien la richesse de la Rue des Juifs d’autrefois. Là aussi, l’anonymat s’impose, les traces juives de vie urbaine s’effacent. Demeure alors la reconstitution symbolique d’un espace urbain proprement juif à travers un marquage qui témoigne de l’existence, au cœur de la modernité, de la présence de l’eruv, ce «territoire shabbatique» conçu autrefois par la Mishna. Jusqu’au sein des grandes métropoles contemporaines, de New York à Baltimore ou Boston, Washington et même Londres ou, en France, Strasbourg, la présence d’un eruv trace un espace juif, une Rue des Juifs d’un nouveau genre, ghetto virtuel en fonction d’un enfermement fictif qui légitime le déplacement des Juifs durant le shabbat. Résultant d’un accord avec les voisins, du paiement symbolique d’une somme destinée à louer ces traces provisoires matérialisées parfois par des câbles, l’eruv représente-t-il dorénavant, en dehors de quelques lieux où affluent les touristes, la seule forme visible de la Rue des Juifs? En dehors d’une ‘rue juive’ qui existe bel et bien en Israël tout comme dans certains îlots de New York, l’eruv rend public un espace privé et invente, ici ou là, un «territorialisme diasporique», pâle évocation de l’intense sociabilité urbaine juive d’autrefois. |